En guise de conclusion

Ouf !...Tout est bien qui finit bien. Mais, dans le contexte de l'époque, il est indéniable que ces cinq là reviennent de loin !

Si les victimes ne sont pas des spéléos au sens où nous l'entendons, l'ambiance de ce sauvetage n'est pourtant pas sans rappeler les opérations de secours que nous avons connues ces dernières années; les crues souterraines nous ont habitué à ce type d'atmosphère. Les secours de la Borne aux Cassots, de la grotte des Moulins et de Goumois n'en sont que des "remakes". Tout y est, l'angoisse, la solidarité, l'ingéniosité, le dévouement, les nuits blanches, les pompiers et même les scaphandriers... Décidément, nous n'avons rien inventé.
Il est tout de même étonnant que cette  aventure, peu banale en son temps, n'ait pas plus marqué la mémoire spéléologique. Il s'agit pourtant bien de la première opération de secours spéléologique connue en France.

Quelques années auparavant, des faits similaires avaient toutefois fait grand bruit. Du 28 avril au 7 mai 1894, à l'autre bout de l'Europe, dans le sud-est de l'Autriche, la grotte du Lur-Loch avait défrayé la chronique : sept membres de la Société Spéléologique de Styrie s'étaient retrouvés emmurés par suite d'une montée d'eau soudaine. Les opérations de secours avaient duré 9 jours. Après avoir tenté une vaine dérivation de l'arrivée d'eau, on avait fait appel à deux scaphandriers.  Ayant franchi la galerie noyée, ceux ci  avaient réussi à prendre contact avec les victimes. Ils avaient ensuite guidé des travaux de forage permettant ainsi  la libération des prisonniers.
Dans le cas de Jeurre, malgré la fertilité des détails donnés par l'ensemble des documents d'époque, nous ne savons que très peu de choses sur l'identité des cinq rescapés. Un seul nom a réussi à franchir la barrière du temps. Il nous est délivré au travers de l'article de l'Union Jurassienne du 11 novembre 1899. Les détails savoureux qui l'accompagnent nous incitent d'ailleurs à citer l'extrait : " L'un d'eux, le sieur Bouchardini, habitant St-Claude, père de cinq enfants, a raconté que le temps commençait à leur durer et qu'ils n'avaient plus qu'une chique de tabac et environ 10 centimètres de bougie. Ils ont ajouté qu'ils avaient entendu la cartouche de dynamite partie la veille dans la grotte et qu'elle leur avait donné du courage."pompier

Au village de Jeurre, la tradition orale a conservé quelques bribes de cette péripétie. On parle encore du jeune domestique qui, malgré lui, s'était retrouvé prisonnier dans cette caverne hostile. On dit que sa raison aurait été sérieusement ébranlée par les 38 heures de claustration. Ce séjour forcé, au milieu de quatre étrangers affamés baragouinant entre eux, lui aurait ravivé quelques souvenirs d'enfance. Comment ne pas associer cette situation à la chanson du "Petit Navire" où le jeune mousse est désigné par le sort pour être dévoré par ses compagnons d'infortune ?

Angoisse...